L’immensité des défis et les choix stratégiques de la Transition ont rendues les missions des dirigeants plus difficiles. Ce dernier virage de la gouvernance maintiendra-t-il l’espoir ?
Selon de nombreux observateurs avertis de la scène sociopolitique nationale, le gouvernement Général Abdoulaye Maïga a l’impérieux devoir de travailler à baisser l’adversité, pour aller à des élections, dans un climat apaisé. Le Général de division Abdoulaye Maïga doit, dans ce sens, carburer dur pour atteindre cet objectif fondamental, dans un délai raisonnable.
En effet, le nouveau Premier ministre est condamné à réussir. ou, du moins à faire oublier son prédécesseur. Cela doit se faire avec une nouvelle posture. Même si le nouveau chef du gouvernement assure ne pas faire « un changement de cap », mais « une réorientation technique » de l’action gouvernementale. Celle-ci doit s’inspirer du modèle sénégalais, où la rupture d’avec la France se fait avec tact et fermeté, mais sans invectives. Idem du reste du cas tchadien. Car, la souveraineté de nos Etats est simplement « incompatible avec la présence de bases militaires françaises sur notre sol », comme l’a souligné, la semaine dernière, le président Bassirou Diomaye Faye.
En fait, si son prédécesseur, Dr Choguel Kokalla Maïga, a été jugé trop prolixe, le nouveau Premier ministre devrait moins donner de la voix. Le général Abdoulaye Maïga, étant un haut gradé de l’Armée, donc de la Grande Muette, il devrait être plus réservé ou moins loquace, pour apparaître moins « clivant », moins remonté, voire embarrassant…. Et il semble que les instructions du chef de l’Etat à son endroit ont été claires : « agir plus et parler moins ».
Ainsi, le nouvel occupant du palais de la primature a les chances de rassembler l’essentiel de ses interlocuteurs, notamment ceux de la classe politique nationale et même des partenaires du pays. Même si, alors Col Abdoulaye Maïga, il s’était illustré à la tribune de l’ONU par un discours critique à l’égard des partenaires occidentaux… Sans oublier les tons incisifs de ses communiqués, marqués par des « je le répète une dernière fois… » ou des « A bon entendeur, tant pis ! ». Mais, on lui prête un pragmatisme et une certaine maturité, qui ne devraient plus attiser des velléités d’empoignades verbales de cette nature. Puisque, des sources indiquent que le poste de porte-parole du gouvernement devrait être cédé à un autre membre du Gouvernement, pour plus d’efficacité et d’impact sur le quotidien des Maliens.
En effet, à travers ses premières actions de Premier ministre, l’on peut prêter au Général Abdoulaye Maïga, les faveurs des pronostics. Surtout que, comme le disait Pierre Corneille : «Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années ». Ce qui a fait que l’homme a annoncé les couleurs en décidant, comme le chef de l’Etat, de consacrer les deux tiers de ses fonds de souveraineté aux œuvres sociales et humanitaires. Comme pour sceller sa loyauté et sa fidélité ou, en tout cas, sa convergence de vue avec le président de la Transition, le Général d’Armée Assimi Goïta. Quelle chance de succès la gouvernance peut-elle enregistrer sans cette communion d’esprit entre les deux têtes de l’Exécutif ? Aucune ! Ce qui n’a pas été le cas avec Dr Choguel Kokalla Maïga, qui a pu utiliser une partie de ses fonds de souveraineté pour entretenir les nombreux vidéo-mans à sa solde…
Cette décision majeure du nouveau PM, consistant à appuyer les actions caritatives du chef de l’Etat, doit renforcer les actions sociales et de bienfaisance des plus hautes autorités de la Transition. Ce qui va aider à soulager bien de préoccupations des couches les plus défavorisées.
En outre, le Général de division Abdoulaye Maïga a, en un temps record, mis le cap sur la crise énergétique que traverse le pays. Histoire d’y consacrer une bonne partie de son énergie. C’est en effectuant sa première visite de terrain à la société Energie du Mali (EDM-SA). Ici, de façon inédite, une première dans l’histoire du Mali, le chef du Gouvernement a affiché toute sa détermination à trouver la solution aux délestages électriques qui plombent les activités dans le pays. Il a ainsi donné des instructions claires au ministre de l’Energie et au DG d’EDM-SA pour qu’à sa seconde visite, dans les prochains jours, à EDM-SA, des mesures concrètes soient édictées pour juguler définitivement cette pénurie du courant électrique.
Dans la foulée de cette première sortie de terrain, le chef du Gouvernement a tenu, quelques heures plus tard, une rencontre avec le ministre du Commerce et de l’Industrie, en présence de son homologue de l’Economie et des finances, pour discuter des problèmes socio-économiques brûlants. Ici aussi, des instructions fermes ont été données pour impacter positivement sur le quotidien des populations.
Il faut rappeler, par ailleurs, qu’ayant dirigé le cadre de concertations entre le gouvernement et la classe politique, le nouveau chef du Gouvernement sera à même d’aider à la décrispation politique, souhaitable pour des élections apaisées. N’a-t-il pas déjà souligné la volonté d’aller, dans un délai raisonnable, vers la tenue d’élections libres, transparentes et apaisées ? L’ancien ministre d’Etat et porte-parole du gouvernement va sûrement déblayer pour accélérer la cadence des préparatifs des prochaines élections.
En outre, le Général de division Abdoulaye Maïga est un officier général de gendarmerie, qui a passé le plus clair de sa carrière dans les institutions gouvernementales. A 43 ans, l’homme est réputé plus proche du monde politique et diplomatique. C’est pourquoi les observateurs les plus avertis estiment qu’il a un « sens élevé d’écoute » et de pondération, susceptible de l’aider dans ses nouvelles missions. Et il faut souligner que le nouveau PM maîtrise aussi le monde associatif ou celui de la société civile avec lequel il a longuement collaboré, dans le cadre des réformes en chantier.
Avec quatre ans d’expériences au ministère de l’Administration territoriale, le nouveau chef du gouvernement a développé le contact facile avec les représentants des forces vives du pays. Sans oublier que le chef du département de l’Administration du territoire s’est rapidement familiarisé, avec l’ensemble des acteurs du pouvoir décentralisé et déconcentré. Ce qui lui assure une certaine connaissance du territoire national, à travers gouverneurs, préfets et sous-préfets. Surtout que le Général Abdoulaye Maïga avait été à la manette lors de diverses rencontres entrant dans le cadre du dialogue inter-Maliens
Par ailleurs, avec la nomination du Général Abdoulaye Maïga à la primature, il est certain que l’on n’assistera plus à ces querelles politiciennes de positionnements qui ont miné le M5-RPP. L’homme, selon des confidences de ses proches collaborateurs, va se mettre à l’entière disposition du président de la Transition, en lui assurant engagement et dévouement dans la conduite des affaires ; tant au plan politique que socio-économique. Ne nourrissant aucune ambition de briguer le fauteuil présidentiel, contrairement à son prédécesseur, le chef du gouvernement, doit avoir le temps et l’énergie nécessaire pour redorer le blason de la Transition et de la primature.
Il faut souligner aussi le fait que le Général Maïga n’étant pas du premier cercle restreint des officiers ayant fait le coup d’Etat d’août 2020, il ne se fera pas prier pour agir afin de mériter la confiance, que le Général d’Armée Assimi Goïta a fini par placer en sa modeste personne. Il se battra, le cas échéant, en faveur d’une éventuelle candidature de son bienfaiteur et essaiera de consolider les acquis de la Transition. Il s’agit, par exemple, des options stratégiques prises avec la création de la confédération de l’AES et les réformes majeures de gouvernances opérées. Choguel ne lui disait-il pas lors de la passation de services « le monde, l’Afrique et l’AES nous regardent, bonne chance » ? Le Général de division Abdoulaye Maïga semble hautement conscient des enjeux de son arrivée à la primature, en ces temps plus que difficiles de la marche du Maliba. Il n’a surtout pas droit à l’échec !
Boubou SIDIBE
Source : maliweb.nett