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L’Alliance des États du Sahel (AES) considère son retrait effectif de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dès sa date d’annonce et n’a cessé de le marteler à chaque occasion pour se faire mieux comprendre de tous ceux qui sont attentifs aux intérêts de la sous- région ouest africaine…

Cette volonté de prise en main de leur destin commun menacé s’est encore affirmée à travers la création de la Confédération de l’AES le 6 juillet 2024 à l’issue du Sommet des Chefs d’État des trois pays.
Si l’annonce du retrait de la CEDEAO a surpris beaucoup d’observateurs, elle ne parait pas illogique pour qui connait les raisons de « l’ingérence des militaires » dans la gestion politique dans les trois États et de la réaction négative que la Communauté a présentée lors de chacune de ces « ingérences ». Mais, à la vue de l’accueil populaire lors de ces ingérences, il aurait fallu être plus prudent dans la « fermeté communautaire » affichée.
Trois États sans accès à la mer, grands clients de certains des États côtiers, confrontés de façon progressive à une situation d’insécurité qu’aucun fanatisme ou exclusion sociale ne saurait expliquer, « décidés » à prendre des mesures pour se libérer de cette situation de cercle vicieux qui se développe de façon spirale dans l’humiliation, la contrition imposée aux États accusés d’abandon d’une certaine population de leur pays.

Des villages entiers ont été décimés dans au moins deux de ces États (Mali et Burkina Faso) dans une certaine manipulation des esprits pour mettre en avant les armées nationales dont la responsabilité de protection des populations pour lesquelles ces armées ont été créées a été mise à rude épreuve à travers des informations dont l’orientation pour nuire ne souffrait d’aucun doute. C’est encore le cas avec les prétendus actes de cannibalisme au sein des armées avec des vidéos dont l’intention de manipulation est évidente. Les supposés « soldats » dans la mise en scène filmée n’étant pas poursuivables car ne faisant pas partie des effectifs de ces armées nationales. L’épisode de « Bokassa cannibale tueur d’enfants » monté de toute pièce par les services extérieurs étrangers (français) est encore dans les mémoires.
Tout cela s’est passé durant près d’une décennie dans le Sahel sans aucune réelle prise de conscience et d’un engagement communautaires prononcés.
Depuis l’annonce du retrait, les actes des responsables chargés de la gestion de la Communauté ont consisté à informer sur la perte des « avantages » liés à l’appartenance communautaire pour ceux qui sont sur le départ. L’énumération fastidieuse d’une longue liste de projets et autres avantages engrangés par la Communauté dont les pays seront privés a laissé pantois plus d’un observateur. Au lieu d’être stratégiques sur les limites de la volonté collective de construction d’un ensemble commun, les réactions sont tombées comme des menaces de perte de quelques avantages. Que perd la Communauté avec le retrait des pays de l’Alliance ? Que va faire la Communauté pour préserver l’esprit de construction commune malgré les péripéties internes et externes ? Quels sont les risques et les impacts probables d’un retrait de trois de ces membres pour les raisons mise en avant ? Quels dispositifs en place ou à mettre en place pour que ces retraits ne mettent pas à risque le dessein de construction communautaire ? Comment comprendre que des États membres affirmant leur attachement à l’esprit de communauté affirmée comme c’est le cas du Mali dans sa constitution depuis son indépendance puissent décider ainsi de tourner « dos » à ce dessin ?
L’argument ou l’accusation de « putschistes qui veulent préserver leur pouvoir » est trop court comme argument. Que fait-on des arguments que les responsables des États de l’Alliance mettent en avant pour se justifier ?
Le contexte a été très pollué par de nombreux acteurs et facteurs échappant souvent à la fois à l’Alliance et surtout à la Communauté pour permettre d’émettre un avis acceptable par les deux parties qui sont obligées par l’histoire et la géographie de côtoyer, de coopérer et de co-construire leur avenir forcement et fortement lié. Les conjonctures contextuelles ne pouvant rien à cela à part retardé les échéances.
Il est dit dans le Traité révisé que « La Communauté vise à promouvoir la coopération et l’intégration dans la perspective d’une Union économique de l’Afrique de l’Ouest en vue d’élever le niveau de vie de ses peuples, de maintenir et d’accroître la stabilité économique, de renforcer les relations entre les États Membres et de contribuer au progrès et au développement du continent africain ». La Communauté promeut dans ses principes le « règlement pacifique des différends entre les États membres, coopération active entre pays voisins et promotion d’un environnement pacifique comme préalable au développement économique (Article 4 (f)) ; le ( e ) Maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité régionales par la promotion et le renforcement des relations de bon voisinage ; ainsi que ( k ) la promotion d’un développement équilibré de la région en accordant une attention aux problèmes spécifiques de chaque État Membre, notamment à ceux des États membres sans littoral et des États Membres insulaires ». Apparemment, le respect des principes démocratiques semble plus important que les vies de centaines de personnes tuées annuellement dans les États sinon comment comprendre la décision de prendre des sanctions économiques au nom du non-respect des règles « démocratiques » de prise de pouvoir ? Les récents évènements au sein du Parlement de la CEDEAO après les propos du député Sénégalais Guy Marius SAGNA affirmant que ce sont « nos chefs d’États qui appauvrissent nos pays », mal appréciés par la présidence de séance, sont une illustration d’une Communauté plus soucieuse de préserver l’honorabilité d’une élite politique au détriment du bien-être des populations. Le communiqué qui a suivi est venu taire toutes les hésitations qu’on pouvait en avoir. Dans quelle mesure le « AO » de CEDEAO garde-t-il tout son sens sans les trois États du Sahel ?
Il est plus sage pour les deux parties de se mettre sur la table de négociation pour le succès des objectifs de chacune des parties voulant évoluer individuellement et collectivement. Donner trop de forces aux avis de « conseillers » occultes les empêche de réfléchir à leurs propres intérêts collectifs à longs termes. Pour une fois, il y a besoin d’être responsables et défier les mauvais augures sur l’incapacité des africains à réfléchir et agir par eux-mêmes. La survie collective en dépend. Mettre en avant les orgueils « nationaux » ne fera que remettre encore à plus tard le sursaut humain obligatoire pour la prise en main d’un destin commun obligatoire.
Sidi COULIBALY
Source : L’Aube

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