Les hommes d’affaires maliens confirment que la création de cette organisation offre de nombreux avantages aux opérateurs économiques des trois pays. Ils demandent la levée des barrières douanières, la promotion de la culture du blé et la bonne circulation des médicaments dans l’espace AES…
Au cœur de la région sahélienne, une nouvelle dynamique stratégique s’est dessinée avec la création, le 6 juillet dernier, de la Confédération de l’Alliance des États du Sahel (AES). Par cette initiative, le Mali, le Burkina Faso et le Niger entendent mutualiser leurs moyens pour un développement durable basé sur leurs ressources propres et un partenariat respectueux de la souveraineté de chacun des trois pays. Dans la déclaration de Niamey qui consacre la naissance de la Confédération AES, les chefs d’État ont affiché leur détermination à assurer un développement durable en mettant en œuvre une politique économique et sociale endogène. Mieux, ils ont exprimé leur volonté commune de prévenir les déséquilibres commerciaux et de maintenir la confiance des acteurs économiques.
Qu’attendent les opérateurs économiques maliens de cette Confédération censée promouvoir les échanges économiques et commerciaux afin de transformer le potentiel économique en résultat de développement tangible axé sur le développement endogène ? Des acteurs du secteur privé se sont confiés à notre équipe de reportage. Rencontré au Centre international de conférences de Bamako (CICB), le premier vice-président en charge du commerce au Conseil national du patronat du Mali (CNPM), Cheick Hamalla Simpara, est optimiste : «Nos attentes sur le plan institutionnel, c’est que les principaux responsables soient en phase. On a un idéal commun et une vision commune et il y a une orientation commune. En des pareils cas, je pense qu’il y a une symbiose qui se crée dans cet ensemble qui est cohérent et qui est lié par le même destin.»
Cheick Hamalla Simpara pense que la Confédération AES offre beaucoup d’avantages aux opérateurs économiques des trois pays. Et pour la concrétisation des ambitions sur ce plan, préconise-t-il, les barrières qui entravent les échanges commerciaux entre les trois États, doivent être levées. «C’est un milieu ouvert et complémentaire. Les responsables doivent se parler et les opérateurs économiques doivent se regrouper pour mutualiser leurs efforts, leurs biens et dire que la concurrence n’est plus entre nous mais plutôt entre nous et les autres.
Avec cet idéal, on se regroupe. Cela à l’avantage de grossir notre marché de consommation parce que l’économie est liée à la consommation et la consommation a déclenché la production. L’un dans l’autre, c’est une bonne opportunité», soutient le vice-président du CNPM, soulignant que les opérateurs économiques de ces trois pays sont en contact quotidiennement, mais ce sont les institutions qui sont en retard. «On n’a pas la notion des frontières, car une personne peut avoir sa boutique au Burkina et sa maison au Mali. Cette Union nous rassure», dit-il.
AVANTAGE COMPARATIF- Mamadou Lamine Haïdara est le président de la Fédération des boulangers et pâtissiers du Mali et président de la chaîne de valeur de la filière pain. Lui recommande également la levée des barrières douanières et la création d’un cadre de concertation entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger. « Il faut prendre des décisions unilatérales propres aux trois États parce que le blé est une denrée rare. Il va falloir intensifier sa culture et mettre les instruments en place pour accélérer la production et la productivité de la culture du blé», suggère-t-il.
Mamadou Yattassaye, président de l’Organisation patronale des industriels du Mali, abonde dans le même sens estimant que la mutualisation des moyens de ces trois États (confrontés à des défis sécuritaires) pour une densification de leurs besoins, ne peut être qu’une opportunité pour les opérateurs économiques. Et au président du Syndicat privé des pharmaciens, Dr Cheick Oumar Dia, de renchérir : « Si je prends le pan de la souveraineté thérapeutique qui est la fabrication des médicaments, je pense qu’il serait intéressant que lorsque le Mali produit un médicament qu’ on peut le vendre plus facilement au Burkina Faso et au Niger et vice-versa».
Pour ce syndicaliste, les goulots d’étranglement qui existent souvent par rapport aux barrières douanières et autres doivent tout simplement disparaître. Ainsi, le système de Confédération permettra la circulation des médicaments dans la zone AES sans beaucoup de contraintes.
«C’est un avantage comparatif par rapport à l’espace global qui est la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Cet espace AES, qui parait restreint aujourd’hui, permet une bonne circulation des médicaments sans beaucoup de contraintes douanières et autres.
C’est un aspect très important», commente le pharmacien. Selon lui, le coût de la consommation de médicaments dans les trois pays membres s’élève à plus de 600 milliards de Fcfa par an. «Ce serait donc une valeur ajoutée qu’on puisse prendre notre souveraineté thérapeutique en fabriquant des médicaments et en inévitable d’importer tout», dit-il.
Dr Cheick Oumar Dia apprécie cette initiative de nos dirigeants et se dit très optimiste, puisque l’AES s’élargira dans les jours à venir. «Il faut faire une analyse très approfondie de toutes les contraintes et les avantages que nous pouvons tirer de cette Confédération», exhorte notre interlocuteur.
Babba COULIBALY
Source : L’Essor