La France sera-t-elle ingouvernable? Les résultats des élections législatives n’offrent aucune garantie sur le futur politique de nos voisins. S’il est arrivé en tête avec 182 députés, le Nouveau Front Populaire est bien loin des 289 sièges nécessaires pour avoir la majorité absolue. Le camp d’Emmanuel Macron n’est plus le premier à l’Assemblée nationale, même si une coalition pourrait lui sauver la mise. De son côté, le Rassemblement National réalise un score historique mais très en deçà de ses espoirs…
Enfin, le risque d’un blocage institutionnel est réel. On fait le point sur les différents scénarios possibles.
1er scénario: le NFP au pouvoir
C’est l’enseignement majeur de ces élections: le Nouveau Front populaire sera la plus grande force à l’Assemblée nationale, avec 182 députés. Dans le détail, 77 appartiennent à La France insoumise, 54 au Parti Socialiste, 28 aux Ecologies, 9 au Parti Communiste, 5 à Générations et 9 à Divers gauche. Selon Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron a “le devoir d’appeler le NFP à gouverner”, malgré l’absence d’une majorité absolue.
Comment la coalition de gauche compte-t-elle procéder en cas d’arrivée au pouvoir? Une partie de son programme passerait par décret, affirment les Insoumis. Il s’agit des principales propositions, comme la hausse du salaire minimum, l’abrogation de la réforme des retraites ou encore le blocage des prix. Et pour le reste? Il s’agira d’aller chercher des majorités au cas par cas pour voter chaque projet de loi, voire de recourir à l’article 49.3.
Cette hypothèse est possible si ce gouvernement du NFP ne voit pas une motion de censure être voté contre lui à l’Assemblée nationale. Elle serait certainement déposée par Les Républicains ou le Rassemblement National. Pour ne pas être renversé, il faudrait donc convaincre une partie des députés de la coalition présidentielle Ensemble de ne pas la voter.
Rappelons que les gouvernements d’Emmanuel Macron ont dirigé le pays ainsi pendant deux ans: le camp présidentiel était minoritaire, mais continuait de gouverner grâce au fait que les oppositions de droite, de gauche et d’extrême droite n’ont jamais joint leurs forces pour le renverser.
2ème scénario: une coalition Ensemble-LR
Avec 163 sièges, Ensemble (Renaissance d’Emmanuel Macron, Horizons d’Edouard Philippe et le MoDeM de François Bayrou) dispose d’un bloc solide mais légèrement inférieur au Nouveau Front Populaire. Mais un serpent de mer politique permettrait au président de garder la main. Sa position centrale ouvre la voie à une coalition avec Les Républicains et les divers droite ou UDI, qui ont obtenu 68 sièges. “Nous tendons la main aux Républicains”, a lancé sur BFMTV Benjamin Haddad, député Ensemble. “Je le dis depuis deux ans, je souhaite qu’on travaille avec eux.”
Cette alliance disposerait de 231 députés, ce qui est toujours insuffisant pour une majorité absolue, mais qui permettrait d’avoir la plus grande force de l’Assemblée. Mais ici encore, ce gouvernement vivrait sous la menace d’une censure.
3ème scénario: une coalition “à l’allemande”
Pour espérer une majorité absolue, la seule solution est une coalition “à l’allemande”. Il s’agirait d’ajouter les députés du Parti socialiste (et non ceux de LFI, jugés “trop” à gauche) à ceux d’Ensemble et des Républicains pour avoir 296 députés. Le patron d’Horizons, Edouard Philippe, a dit vouloir “favoriser la création d’un accord” sans le RN ni LFI.
La pratique est courante en Allemagne, où des partis aux idéologies différentes s’allient régulièrement pour former une majorité. Mais elle n’a jamais eu lieu en France. Surtout, elle semble exclue par le Parti socialiste. “Nous n’aurons qu’une seule boussole, celle du programme du Nouveau Front populaire”, a ainsi annoncé dès l’annonce des résultats Olivier Faure, premier secrétaire du PS.
4ème scénario: un gouvernement technique
Une porte de sortie en cas de statu quo. Un gouvernement “technique” est comme une “super administration” constituée de ministres qui n’ont pas forcément d’étiquettes politiques mais qui gèrent les affaires courantes. Ce sont généralement des experts (économistes, hauts-fonctionnaires, diplomates, etc…) qui sont dirigés par un Premier ministre qui fait consensus.
Si certaines réformes pourraient ainsi voir le jour, on en resterait au strict minimum. Ce concept un peu abstrait n’a jamais existé en France. L’Italie s’est déjà retrouvée plusieurs fois dans cette configuration, mais cela restait toujours sur du court terme.
5ème scénario: une crise instutitionnelle
Même un gouvernement technique pourrait être renversé par une motion de censure. Si aucun des scénarios précédents ne fonctionne, la France serait plongée dans une profonde crise. Seule certitude: l’Assemblée nationale ne peut pas être dissoute dans l’année qui suit les dernières élections. La nouvelle Assemblée nationale devrait donc siéger au moins jusqu’à l’été 2025.
“S’il n’y a pas de majorité, la solution pour sortir de l’impasse, c’est qu’Emmanuel Macron s’en aille. C’est normal, c’est lui qui est responsable de la pagaille”, avait assuré Jean-Luc Mélenchon. Là encore, ce scénario ne s’est jamais produit en France. Emmanuel Macron avait d’ailleurs exclu de démissionner, “quel que soit le résultat”.
Source: https://www.7sur7.be/