Le ministre de l’économie et des finances, face au Conseil National de transition, qui fait office de parlement, a affirmé avoir renoncé aux 37 milliards de francs CFA au titre du prêt que la Banque mondiale avait accordé au Mali pour la fourniture de carburant afin de donner de l’électricité aux populations, sous prétexte que les conditionnalités proposées par l’institution financière viole la Constitution car elles portent atteintes à la souveraineté du Mali. A-t-on besoin de sortir des prestigieuses écoles d’économie et des finances pour savoir démêler le vrai de l’ivraie à propos des prêts de la banque mondiale ? Qui du ministre des finances ou du peuple est dupe?…
Nul besoin d’avoir un doctorat ou un master en économie, en finance ou de travailler dans les succursales de la banque mondiale pour savoir comment les prêts sont accordés aux pays. Ils le sont sur la base d’un ou des accords entre parties. En d’autres termes les institutions de Breton Wood n’accordent des prêts qu’après avoir rempli tous les critères, toutes les conditionnalités auxquelles elles soumettent les pays demandeurs. C’est pourquoi les négociations peuvent prendre du temps, mais c’est une fois que les parties tombent d’accord qu’il y a signature et après cette étape l’on passe à celle des décaissements dont les modalités sont expliquées dans l’accord. Le Ministre des finances après avoir participé à la réunion du printemps du FMI et de la Banque Mondiale est parvenu, après d’intenses négociations, à avoir un prêt de 60 millions de dollars avec la banque mondiale pour atténuer la souffrance des populations qui souffrent le martyre à cause des délestages. La grande interview qu’il a accordée à l’ORTM fait mention de tous les contours qui entourent ce prêt de la banque mondiale, à savoir que le carburant en question sera payé dans un des Etats de l’OMVS, l’organisation pour la mise en valeur du Fleuve Sénégal, qui regroupe le Mali, la Mauritanie et le Sénégal. Pourquoi le Ministre des finances va encore parler du Niger avec qui un accord a été signé pour l’achat de 150 millions de litres de carburant et en comptant sur le prêt de la banque mondiale ?
Qui du ministre des finances ou du peuple est dupe ?
Pour le ministre de l’économie et des finances, Alhousséni Sanou, les conditionnalités imposées par la banque mondiale violent la Constitution du Mali, car elles sont en déphasage avec les principes édictés par le Président de la transition dont celui du respect de la souveraineté. La question que beaucoup d’observateurs de la scène politique se posent est celle de savoir si le Ministre ne savait pas qu’en demandant un prêt à la banque mondiale on renonce à une partie de sa souveraineté pour accepter souvent des conditions draconiennes ? Faire encore cas de la souveraineté après avoir signé l’accord avec la banque mondiale ne relève-t-il pas d’un déni de réalité ? Mieux, pourquoi tenir coute que coute à régler le paiement du carburant du Niger avec l’argent de la banque mondiale fut-il un prêt, sachant bien que les pays de l’AES ne sont pas en odeur de sainteté avec ceux qui détiennent les cordons de la bourse mondiale, à savoir l’occident ? N’a-t-on pas diversifié nos partenaires pour multiplier nos chances d’avoir des fonds pour financer nos projets de développement ? Alors si jean refuse tournons-nous vers Paul sans tambours ni trompètes.
En définitive, c’est pour toutes ces raisons qu’il est important, voire nécessaire de coopérer avec tout le monde. Certains sur le plan militaire d’autres sur le plan du développement. Surtout pour un pays comme le Mali en proie à une crise multidimensionnelle. Le Mali n’est-il pas en train de payer le prix de son isolement diplomatique ?
Youssouf Sissoko
Source L’Alternance