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Contrairement à ce qui est dit dans ce reportage, le Président Modibo Keïta n’a jamais suspendu la Constitution. Trop d’affirmations gratuites, trop d’erreurs (comme la confusion entre la création du FCFA et celle du FM le 1er juillet 1962). Aussi, la création de la SOMIEX (Société malienne d’import-export) était une nécessité vitale pour le jeune État…


En effet, suite à la proclamation de l’Indépendance le jeudi 22 septembre 1960, la Chambre de Commerce, contrôlée à l’époque par les maisons coloniales françaises et les libano-syriens décrète dès le lendemain la fermeture de toutes les boutiques “pour que les indigènes sachent que l’Indépendance n’est pas une bonne chose“.
Un Gouvernement responsable n’aurait pas pu rester les bras croisés face à un tel défi. Oumar Ly, alors Directeur de Cabinet du Président Modibo Keïta et Inspecteur des Impôts de formation, reçut mission de faire le tour du monde “pour acheter tout ce que le Peuple pouvait manger” avec une cagnotte de FCFA 100 millions mobilisée en raclant les fonds de tiroirs. Puisqu’il n’y avait aucun indigène dans le commerce d’import-export, il a bien fallu créer une structure pour prendre en charge cette fonction essentielle: ce fut la SOMIEX, dotée du monopole de l’import-export de certains produits essentiels (et non de toutes les marchandises comme certains le prétendent). Oumar Ly en fut le premier Directeur Général.

Le reportage passe sous silence l’une des causes fondamentales de l’inflation à l’époque: la France continuait à inonder le marché de faux billets de FM. Aussi, nos États ont toujours eu de la peine à prévenir ou à juguler l’inflation découlant d’une dévaluation, comme ce fut le cas encore en janvier 1994.
Les mutations de l’instituteur Modibo Keïta à Sikasso puis à Kabara étaient en fait des mesures d’exil pour limiter son influence politique au Soudan. Par exemple, pour contourner la mesure discriminatoire de l’Administration coloniale interdisant aux indigènes de faire la politique, Modibo Keïta organisa dans chaque quartier de Bamako des groupes de jeunes pour faire du théâtre et critiquer les abus des colons à travers des manifestations théâtrales.
En représailles, l’Administration coloniale le muta à Sikasso. C’est là où il se joignit à Jean-Marie Koné pour créer un journal, L’Œil du Kénédougou, pour dénoncer les abus de l’Administration coloniale. Son influence sur les populations était telle que le Commandant de Cercle français signala au Ministre des Colonies que le vrai Commandant de Cercle n’était autre que Modibo Keïta. Dans le même temps, le Commissaire de police français de Sikasso signala à sa hiérarchie que “la vie politique à Sikasso est dominée par un fou, un fou d’autant plus dangereux qu’il est très intelligent“. Il fut donc exilé à Kabara, après un séjour à la prison la Santé de Paris sur plainte pour diffamation du Commandant de Cercle français de Sikasso. Afin de continuer ses activités politiques, il a pris une disponibilité sans solde.
Avant le coup d’État du 19 novembre 1968, il n’y a eu aucune manifestation publique pour exiger le départ de Modibo du pouvoir, contrairement au cas du chef des putschistes de 1968. Aussi, deux jours après le coup de force militaire, il n’y avait aucune manifestation publique pour “saluer” le putsch. Il a fallu recourir à un faux message de soutien diffusé dans l’après-midi du mercredi 20 novembre au nom d’un “tailleur au Badiallan” que nul n’a pu identifier à ce jour.
Dr Soumana Sako, ancien Premier ministre, ancien ministre de l’Économie et des Finances, ancien fonctionnaire international
Source : Inter De Bamako

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