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Cela se passe au Mali et pas ailleurs ! Un chef de village et son conseiller qui s’arrogent le droit de créer leur propre prison pour y séquestrer tous les opposants à leurs projets de prédation foncière, après les avoir fait enlever, torturer, promener nu dans le village, en plus de saccager leurs propriétés. Ce n’est pas une fiction, mais une triste réalité au Mali…


Les faits se sont déroulés au village de Koursalé, au sujet duquel nous ne cessions d’attirer l’attention des autorités sur cette bombe sociale. Les faits sont attestés par des constats d’huissier, mais les auteurs ne sont nullement inquiétés. Pourquoi ? Mystère et boule de gomme !
u début de ce mois, précisément dans la nuit du 1er au 2 mai 2024, à cause d’un litige foncier les opposant au chef de village de Koursalé, des familles ont été attaquées par des individus identifiés comme des proches du chef. Leurs noms ont été communiqués à l’huissier de justice descendu sur les lieux pour faire le constat. Les maisons des victimes ont été pillées, avant d’être démolies. Leurs greniers vidés. Comme l’acte criminel d’attaque nocturne à main armée ne suffisait pas, les assaillants ont enlevé les occupants des maisons ciblées pour les torturer, avant de les séquestrer et ensuite les trimballer nus dans le village en disant haut et fort qu’ils ont détruit leurs biens. Ces faits ont été rapportés à l’huissier de justice, Me Moussa Dagnoko.

Selon le constat de l’huissier dont nous détenons copie, “les dégâts sont énormes et divers” dans les domiciles de Abdoul Traoré, Kanoumori Traoré, yaya Traoré, Zoumana Traoré, Drissa Traoré. Dans l’ensemble, il s’agit de murs démolis, portes de cases enlevées et endommagées, tôles des toits trouées par de larges fentes laissant voir le ciel, d’autres tôles déformées par des traces de cailloux jetés, un puits bouché par des objets qui y sont jetés le rendant hors d’usage, un lit en bois démoli, une radio-magnéto endommagée…Sans oublier les greniers démolis et les stocks de vivres emportés.
Conséquence immédiate de la destruction des toits des cases, l’Huissier constate : “La première épouse de Monsieur Abdoul, Madame Traoré H. Camara, est dans sa chambre recroquevillée sur elle-même à cause de l’humidité à la pluie de la nuit. Pire, elle tient dans ses bras un nouveau-né (garçon) d’une semaine environ. A côté d’elle se trouve une grande tasse remplie de l’eau de pluie de la nuit”.
Impunis, les assaillants vont récidiver les 17 et 18 mai derniers, en attaquant les maisons d’autres habitants du village. Selon le constat général fait par le même huissier ” Nous avons trouvé les familles logées au sein de l’établissement scolaire de Koursalé sous la protection de la gendarmerie nationale du Mali. Les familles à notre passage sont dans une situation de détresse sans précédent.
De l’école, nous nous sommes rendus au magasin qui avait servi de prison privée. Les sangs humains sont sur la porte à notre passage. Puis nous nous sommes rendus dans les différentes familles. La situation est désastreuse à tout point de vue. Les bâtiments servant de logement et autres édifices sont quasiment détruits et démolis. Des trous sont faits sur les murs sous forme de boulevards par endroits, les tôles sont perforées par des objets tranchants, les portes et fenêtres sont enlevées et endommagées, les toits des cases sont déposés voire renversés par terre. Les greniers, céréales (mil, riz et arachide), les habillements, la literie, les ustensiles de cuisine n’ont pu échapper à la destruction. Les puits, poulaillers, charrettes, vélos, motos, groupes électrogènes, effets c’écoliers, radios, magnétos…sont aussi saccagés.”
Ce tableau déjà très noir et plus qu’accablant, ne reflète pas pourtant toute la réalité puisque, comme le précise l’Huissier : “Nous ne saurions tout énumérer car la situation est dramatique et indescriptible…”. C’est pourquoi, pour mieux se faire comprendre, il a procédé au constat par famille (Familles Djénéba Traoré, Broulaye Kéïta, Abdou Traoré, Djouma Traoré, Chaka Traoré, Daouda Traoré, Drissa Traoré et Mamadou Doumbia).
Mais comment cela peut-il se passer dans un pays dit de droit comme le Mali sans que les auteurs, bien identifiés, ne soient poursuivis et punis par les lois en vigueur ? Ou bien parce qu’ils détiennent le pouvoir de distribuer des terres que cela leur procure une impunité qui fait loi ?
Le chef de village de Koursalé et son conseiller, un certain Chaka Dabo, sont toujours cités par les victimes dans leurs déclarations recueillies par l’Huissier et ce n’est pas la première fois qu’ils se voient cités dans un litige foncier d’un village où la chefferie même pose problème avec, à la base, une contestation qui dure depuis plus d’une décennie.
Les autorités, saisies, oint toujours fait la sourde oreille concernant le cas de Koursalé qui, en plus d’être un drame écologique causé par l’exploitation abusive de sable et de gravier, constitue à présent une bombe sociale que les autorités doivent dégoupiller avant explosion. Depuis le 11 mai 2010, le ministre de la Justice d’alors, avait été saisi par Monsieur Drissa Traoré, porte-parole de la famille Sanaba Morila de Koursalé pour faire part de “la persécution des familles Traoré par le chef de village de Koursalé et l’indifférence de la justice dans la gestion de la crise”. Il avait joint à sa lettre un procès-verbal de constat d’huissier accompagné des photos des dommages causés. Eh bien, ce même Drissa Traoré, victime de l’indifférence des autorités d’alors, est l’une des victimes des attaques de ces derniers jours, suite auxquelles il a tout perdu. Inexplicable dans un pays de droit !
Le ministre en charge de l’Administration territoriale et des collectivités, ainsi que son collègue de l’Environnement et celui de la Justice, chacun en ce qui le concerne, est appelé à agir urgemment pour éviter une éventuelle escalade car, à force de désespérer de la justice, les victimes, tels des lions blessés, pourraient tout ravager sur leur passage, notamment dans le cadre d’une vendetta, comme cela se murmure au village.
Le ministre de l’Administration territoriale est appelé à revoir la question de la chefferie dans ce village et en même temps enquêter sur la prédation foncière dans cette localité, en plus de faire la traçabilité des fonds encaissés suite à une convention d’exclusivité de l’exploitation de sable et de gravier sur laquelle nous reviendrons en détail (voir notre édition précédente).
Le ministre en charge des questions environnementales doit effectuer le déplacement sur les lieux pour constater, de visu, l’ampleur des dégâts et demander des comptes.
Quant au ministre de la Justice, avec cette impunité qui conduit à des comportements criminels, il n’est point besoin de lui rappeler la nécessité d’ouvrir des enquêtes sérieuses, avec un traitement du dossier différent de ce qui a été toujours fait et a amené les populations à douter de l’existence d’une justice équitable au Mali. La Transition, c’est aussi pour rétablir l’ordre dans tous les domaines de la vie nationale qui pourraient être des sources de frustration des populations.
Amadou Bamba NIANG, Journaliste et Consultant
Source : Aujourd’hui-Mali

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