Longtemps diabolisés et obligés de raser les murs, les acteurs politiques commencent, lentement mais sûrement, à reprendre confiance et à donner de la voix, malgré le climat de méfiance et de suspicions.
Le contexte du pouvoir d’exception, qui dirige le Mali depuis août 2020, a donné un rude coup de déstabilisation à la classe politique, au point que de nombreux leaders politiques ont dû réajuster ou édulcorer leurs convictions.
En effet, depuis les coups d’Etat de 2012 à 2021, le discours presqu’officiel a mis à la charge de la classe politique la faillite de l’Etat, après trois décennies d’expérience démocratique. En clair, la nouvelle vox populi a claironné que ce sont les dirigeants politiques qui ont échoué ; ce qui a amené les militaires à prendre le pouvoir. Cette lecture de la situation est un raccourci qui ne résiste pas à la critique. Car, l’on oublie que l’armée est aussi politisée et qu’elle n’est pas sans reproche dans l’effondrement du pays. En plus de cela, l’exercice du pouvoir révèle que les militaires aussi n’arrivent pas à engranger de francs succès, dans la satisfaction des besoins vitaux des populations. Ce qui pousse les observateurs avertis à déduire que là où les acteurs politiques ont échoué, les militaires pourraient difficilement réussir.
Ce constat fait que de nombreux leaders politiques se repositionnent, retroussant les manches pour s’offrir en alternatives nouvelles. C’est dans ce sens qu’après une sorte de round d’observation, certaines formations politiques commencent à monter au créneau, qui pour prendre des positions sur les grandes décisions de l’actualité nationale, qui pour une revue de troupes.
En effet, le week-end dernier a été mis à profit pour la tenue d’un congrès d’un parti politique, l’ASMA-CFP, la rentrée politique d’un regroupement comme l’Alliance des associations et partis politiques pour le changement (APC), la conférence de presse d’une nouvelle alliance, Synergie d’action pour le Mali, etc.
Dans toutes ces rencontres politiques, les leaders ont, vaille que vaille, exprimé leurs ambitions de maintenir le cap et prouver aux populations qu’ils se préoccupent de leur sort. C’est dans ce sens que les responsables de la Synergie d’action pour le Mali ont estimé que les populations doivent commencer à se mobiliser pour inciter les autorités à œuvrer pour « un retour rapide à l’ordre constitutionnel ». Pendant ce temps, le premier leader de l’APC, Dr Siaka Diarra de l’UFD, dira que ce regroupement ne manquera pas de jouer sa partition lors des élections à venir.
Or, l’APC s’inscrit dans une dynamique de soutien aux autorités de la Transition. Et celles-ci ne semblent visiblement pas pressées à aller aux élections. Ce qui peut mettre mal à l’aise les plus hauts dirigeants de la Transition de voir que leur allié travaille à éveiller les consciences sur l’après transition. « Aujourd’hui, l’APC couvre le territoire national et est suffisamment outillé pour prendre part aux prochaines échéances électorales avec des listes communes partout dans les circonscriptions électorales », a déclaré Dr Siaka Diarra. Ce discours a-t-il été l’élément qui a milité en faveur du limogeage de Dr Siaka Diarra de son poste de Conseiller technique à la primature ? Nul, ne saurait le dire. Mais, ce qui est sûr, haut cadre du cabinet du Premier ministre depuis 2018, le président du parti UFD, vient d’être poliment remercié. Pour, peut-être, avoir plus de temps en vue de mener ses activités politiques ?
Comme par hasard, un discours similaire tenu par l’ADEMA-PAS, lors de la présentation des vœux de ce parti, a eu, des conséquences semblables. C’est ce qui semble expliquer le limogeage d’Abdel Karim Konaté dit Empé de la tête de l’Office du Niger, après que cet ancien ministre d’IBK, non moins président de l’ADEMA-PASJ, eût déclaré que son parti « aura son candidat à la prochaine élection présidentielle ». Dès lors, l’on peut se demander si les tenants du pouvoir actuel ne sont pas décidés à freiner toute adversité politique dans le pays. Le pouvoir de Transition ambitionne-t-il de conduire le peuple aux urnes à brève échéance ? Toute la question est là, d’autant que le processus électoral connaît aujourd’hui un coup d’arrêt, que les partis politiques cherchent visiblement à débloquer. Parviendront-ils à le faire ? A quel prix. Wait and see !
Boubou SIDIBE
Source : maliweb.net