Au Mali, Moussa Mara demande aux autorités de la transition de fixer un cap en vue de la tenue des futures échéances électorales. L’ex-Premier ministre de l’ancien président Ibrahim Boubacar Keita vient de lancer un appel pour sauver la transition.
Il critique les autorités militaires en place et propose des pistes de solutions autour notamment de la gestion de la crise énergétique, des restrictions des libertés ou encore de l’endettement du pays.
Mais c’est surtout du retour à l’ordre constitutionnel et du dialogue intermalien qu’il s’est entretenu avec notre correspondant à Bamako.
Interview de Moussa Mara
Moussa Mara, vous avez appelé le 7 janvier à « sauver la transition ». Comment cette idée a-t-elle germé ?
En tant que responsable public, en tant que citoyen, je ne peux pas rester passif et témoin d’un l’enlisement de la situation qui peut aboutir à des catastrophes pour nous tous.
J’ai souhaité lancer l’alerte mais aussi, surtout, lancer un appel aux forces vives du pays et aux autorités, afin que nous essayions de nous retrouver autour de l’essentiel et que nous essayions de sauver cet essentiel, c’est-à-dire notre pays et son système démocratique.
Vous vous êtes penché sur les restrictions des libertés, la crise énergétique ou encore le retour à l’autre constitutionnel. Sur ce dernier point, vous n’y croyez plus vraiment ? A vous entendre, il n’y aura pas d’élections cette année ?
Ce n’est pas à m’entendre simplement ! Regardez ce que nos autorités ont décidé. Si vous avez suivi le discours du président de la transition le 31 décembre dernier, il n’a pas donné de date pour le retour à l’ordre constitutionnel en 2024. Il a simplement dit que « les efforts seront poursuivis » pour le retour à l’ordre constitutionnel.
Et si vous avez la chance de pouvoir décortiquer le budget de l’Etat au titre de 2024, vous voyez qu’on a effacé le budget des élections du budget d’Etat. Ce qui n’était pas le cas en 2023. C’est qu’en 2023, on avait prévu de tenir des élections qui n’ont finalement pas été organisées. Là, très clairement, on annonce la couleur: c’est qu’on n’a pas l’intention d’organiser les élections.
Mais, pour autant, vous avez été investi par votre parti, finalement, au mois de décembre dernier, comme candidat à la future élection présidentielle….
Nous avions un congrès statutaire qui est organisé tous les trois ans. Nous avons utilisé ce congrès et respecté les textes du parti pour choisir un candidat maintenant.
Si les élections ont lieu en 2024, nous serons tout-à-fait prêt et tout-à-fait heureux. Mais ce que nous demandons aux organisateurs des élections et à ceux qui en ont la charge, c’est de travailler avec tout le monde, de fixer quelque chose et, quelle que soit la date de ce qui sera fixé en commun, le Mali s’y conformera.
Avez-vous échangé avec les autorités de la transition, autour notamment du léger report décrété en septembre dernier?
Nous n’avons pas eu la chance de discuter avec les autorités sur cette question.
Les autorités ont fait cette annonce à travers le ministre d’Etat en charge de l’Administration. Dès l’annonce il n’y a pas eu d’organisation du cadre de concertation.
A 24 mois [de retard sur la date prévue à l’origine pour organiser les élections], le léger report commence à être un peu plus lourd qu’[un simple] « léger report ».
Mais nous demandons aux autorités de réunir les acteurs politiques et de discuter avec eux sur les deux raisons principales qui ont été présentées comme étant des raisons qui empêchent de tenir les élections en février [2024].
Nous cherchons à entrer en contact avec les autorités individuellement, en tant que parti, mais dans le cadre de cette initiative, de cet appel, je renouvellerai là aussi ma demande pour essayer de rencontrer les autorités et leur demander de s’ouvrir comme je le dis, il faut vraiment que nos autorités de transition s’ouvrent.
Vous ne parvenez pas à les voir ?
Jusqu’à ce matin, non, mais comme je suis un optimiste invétéré, je continuerai à le chercher formellement, je déposerai des demandes d’audience j’utiliserai toutes les parcelles et tous les canaux possibles pour y arriver. Je suis optimiste.
Pour ce qui est du dialogue intermalien, vous prônez l’ouverture, une fois de plus, d’un dialogue avec la CMA, mais aussi avec les groupes terroristes. On vous accuse de ne pas être réaliste.
D’abord je me fonde sur ce que les Maliens veulent. Depuis le dialogue national et inclusif, les assises de la refondation, nos compatriotes ont été très clairs sur la nécessité de parler avec les Maliens qui se sont engagés dans l’aventure terrorise.
Vous savez, je l’ai écrit plusieurs fois, je l’ai dit plusieurs fois: au Mali, il y a terroriste et terroriste.
Quelle est la différence?
Vous avez énormément de personnes qui se sont engagées dans l’aventure terrorise pour chercher un salaire. Vous en avez d’autres qui s’y sont engagés pour se venger. Vous en avez d’autres qui s’y sont engagés pour se protéger. Ils n’ont pas eu le choix, ils ont été enrôlés de force. Vous en avez d’autres qui s’y sont engagés pour être célèbres dans une contrée et avoir la chance d’avoir les plus belles femmes à marier – il y a eu des études sur cette question.
Considérer tout ceux-ci comme des vermines à éradiquer, je pense que c’est faire vraiment des erreurs, et nous l’avons vu ailleurs. Les armes n’ont jamais été seules suffisantes pour vaincre le terrorisme.
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Source : DW